Carnet de voyage, 5 messages
| Extrait de carnet de voyage, Salta, mardi 22 mai, suite, posté le 2007-05-24 00:01:14
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J'ai retrouvé Sabine (suissesse) et Rohan (australien), vieilles connaissances datant de Valparaiso. Ils avaient loué une voiture et je profitais de l'occasion pour me faire inviter. Ce qui m'arrangeait en particulier pour aller de Cafayate a Cachi, trajet qui n'était pas desservi par les bus, tout au moins sur une portion de 40 kilometres (que je comptais sinon faire en stop).
Nous nous sommes donc engagés au matin sur ce chemin consolidé fait de terre et de gravier, a une vitesse que je qualifierais de présomptueuse. Que ca soit l'un ou l'autre de mes comperes, j'avais l'étrange impression de participer a un de ses rallyes automobiles de campagne, sur des trajectoires sinueuses, l'arriere de la voiture chassant meme dans quelques virages. Bien que le danger principal était probablement ces courbes étroites sans visibilité passées a une vitesse excessive, je m'inquiétais plutot pour la mécanique et l'état de la voiture. Pour le reste, le trafic quasi-nul et mes expériences passées m'ayant rendu plutot fataliste, je restais stoiquement a regarder la vallée. Celle-ci était belle et les villages dépassés tres plaisants. |

Alors que les 80% du trajet avait été parcouru, a une trentaine de kilometres de notre destination finale de la journée, et que la route s'était faite moins dangeureuse (moins vallonée, moins sinueuse), ce qui, avec un peu de chance, aurait tres bien pu ne pas arriver, arriva. Toujours dans l'esprit "je conduis comme un jeune con", Rohan prit une longue courbe a l'intérieur. La visibilité n'était pas trop mauvaise et nous vinmes donc arrivé le camion alors qu'il était encore a une centaine de metres de nous. Malgré cela, Rohan roulait vite, bien trop vite, et ne put garder sa trajectoire a droite, commencant a déborder dangeureusement sur l'extérieur. En Argentine, dans ce genre de routes de montagne, les camions ont tendance a ne jamais freiner pour éviter de perdre leur lancée, et sont habitués a se croiser et se froler a des vitesses infernales. C'est probablement pour cela que le conducteur du camion freina un peu tard... De notre coté, les roues bloquées glissaient tranquillement sur les graviers. Voila comment notre voiture vint finir sa course dans le pare-choc avant d'un camion. |

Un choc frontal bruyant mais qui aurait pu etre largement pire. Les deux véhicules avaient ralenti suffisamment pour que la casse ne soit pas humaine. Tout l'avant-gauche de la voiture était enfoncée, pare-choc a terre, radiateur en miettes, phares explosés, circuits de liquides écrasés, boite de vitesse cassée. Sans parler de la carosserie... Le moteur, lui, bien que déporté sur la droite était intact. Du coté du camion, les conducteurs accrocherent le pare-choc enfoncé a un arbre et, en quelques minutes, d'une simple marche-arriere, fixerent le seul dégat qui avait été infligé au véhicule.
Tandis que mes deux amis accompagnerent les deux camionneurs au poste de police, a quelques deux kilometres de la, je restais a garder la voiture et les bagages, renseignant quelques curieux qui passaient sur ce qui était arrivé. Les policiers vinrent relever les circonstances de l'accident (le constat a l'amiable n'existe pas ici), traces de pneu, photos, parties endommagées, etc... Puis repartirent. Deux heures durant j'attendis patiemment. La nuit tomba, le froid avec. Une belle lune et ses étoiles vinrent me tenir compagnie...
Nous passames la nuit dans un village proche. A 9h00, un homme de la compagnie de location nous avait ramené une voiture de remplacement, et s'activait déja sur la voiture détruite, confiant sur le fait qu'il pourrait la ramener a Salta en roulant (c'est-a-dire sur 100 kilometres de routes de montagne en terre). Voila comment, un véhicule qui, sans aucun doute, aurait atterri a la casse en France, fut ramener sur ces 4 roues a Salta le soir-meme, et fut réparer pour seulement un peu plus de 1000 euros... |
| Extrait de carnet de voyage, Salta, mardi 22 mai, posté le 2007-05-23 23:16:17
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La Quebrada (littérallement faille, gorge, ravin, fractionnement...) de Cafayate est magnifique. 50 kilometres parcourus a vélo en compagnie d'un argentin et d'une hollandaise bien sympathiques.
Etranges conglomérats parcourant la vallée, ressemblant a d'immenses termitieres aux parois creusées par les eaux, paysage fractal aux couleurs diverses et incroyables, qui m'ont rappelé les presse-papiers que l'on confectionnait a l'école primaire pour les fetes des peres et des meres; simple pot de yaourt en verre ou l'on versait différentes couches irrégulieres de sables aux multiples couleurs.
Alors que mes deux comperes fatiguaient sur la fin (ils étaient un peu plus agés que moi), je les encourageais lors d'une pause:
- "Allez, on est presque arrivés, vous etes encore jeunes, montrez-moi que vous etes encore en forme!".
L'encouragement vaut ce qu'il vaut. Cependant, l'hollandaise de dire:
- "Tu sais, on pense toujours que je suis plus jeune que je ne le suis vraiment."
- "Mais tu ne sais pas ce que je pense...", répondis-je.
- "Dis-moi."
Je pensais réellement que son age tournait autour des 40 ans, car elle avait un visage relativement marqué et semblait etre rentrée depuis longtemps dans ce comportement caractéristique des vieilles filles. Pensant tomber dans la juste fourchette, je tentais:
- "Entre 30 et 40 ans".
Je lui aurais enfoncé une épée dans le ventre que l'effet n'aurait pas été différent.
- "34", réussissait-elle a prononcer, sans ajouter un mot de plus, le visage défait... | En bonus, un fichier mp3: cliquez ici | Et plus de bonus, un fichier vidéo: cliquez ici |
| Talampaya et poésie, posté le 2007-05-23 22:43:07
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Plus mon voyage avance, plus les mots francais se perdent dans mon esprit.
Ils m'échappent, me fuient. Alors je fais avec ceux qu'il me reste.
Ce poeme est loin de me satisfaire, mais je vous le propose quand meme...
Talampaya
Séparés par les eaux et les ages. Face a face,
Les deux blocs rocheux imposent par leur masse,
Fiers et droits, hauts de quelques cent metres,
Ce sera a celui offrant le plus beau paraitre.
La riviere est de sable, le canyon est de rouge.
La tension est palpable, rien ne bouge.
Alors vient le vent.
Effacer le silence inquiétant.
Comme un arbitre souvenir du temps.
Un des deux murs laisse échapper un soupir,
Une pierre maladroite de crier et de rebondir, |

Venant effacer le mutisme de ces hauteurs...
Les parois immobiles se renvoient la douleur,
Le son s'entete, chante, roule. Soudain s'arrete.
La en bas, quelques guanacos levent la tete.
Une ombre vient de passer sur le roc ensoleillé.
Serait-ce l'esprit de quelques peuples indigenes oubliés?
Pas un nuage ne vient targuer le ciel,
Qui peut donc se permettre de jouer avec le soleil?
Le condor, élégance et majesté,
Silencieusement vient de passer,
Ramenant quelque cadavre bien portant,
Dans son aire perché, inaccessible a tout assaillant.
Quel magnifique charognard,
Qui de la mort a la vie a fait son art...
Le maitre des lieux vient de rentrer.
Je ferais mieux de m'en retourner... |
| Fin de saison en Patagonie, posté le 2007-04-30 22:15:18
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Voila, j'ai quitté El Chalten sous 10 centimetres de neige. Apres une journée froide mais magnifique hier. Cet endroit est vraiment magique. Au 1er mai, certains magasins ferment définitivement leurs portes, fin de saison oblige. Apres les flocons de cette nuit, les sentiers vont etre difficilement praticables et les randonneurs vont se faire rares...
Pour les memes raisons, plus aucun transport commun ne s'engage sur la route 40 vers le Nord, celle qui suit les montagnes, celle que je voulais emprunter. Je suis obligé de rebrousser chemin, puis de voler ou de passer sur la cote atlantique de l'Argentine.
En attendant, je vous souhaite le bonsoir... |
| Extrait de carnet de voyage, vendredi 26 avril, El Chalten, posté le 2007-04-30 22:08:35
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Passage du coté argentin, ou les paysages sont quasiment identiques, c-est-a-dire splendides.
A peine arrivé a El Calafate que je me fais embarquer dans un taxi par 2 chiliens et une allemande, direction le glacier Perito Moreno, principale attraction du coin. L'enchainement est rapide, cela perturbe mon rythme tranquille. Mais c'est une bonne occasion de pratiquer mon espagnol, et le partage d'un taxi a 4 revient moins cher que n'importe quel autre tour. Ajouté a cela, l'allemande est charmante. J'ai vite déchanté sur ce dernier point, en voyant que j'avais affaire a la voyageuse stressée, a l'organisation stricte et droite. "No stress, no stress" lui lancait-on a tour de role avec les chiliens...
Au cours des conversations, je lui faisais part de mon impression de revivre un peu les paysages de la Mongolie, et elle de son désaccord. En l'occurence, normal, puisque sa vision de la Mongolie se limitait a Oulan-Bator. Je tiens a préciser que j'avais rencontré certaines personnes tout a fait d'accord avec moi, entre autres un tres sympathique couple anglais (en tour du monde également) avec qui j'avais passer ma derniere soirée au parc Torres del Paine. |

Puis plus tard, quand je lui expliquais certaines raisons pour lesquelles l'Australie ne m'avait pas vraiment plu, elle s'offusquait de ne pas voir les australiens comme je les voyais. Normal encore une fois, puisque cette fois, elle y avait passé 6 mois a travailler.
Ces deux derniers faits pour rappeler l'énorme différence de perception entre le touriste, le routard et l'expatrié. Alors que le touriste ne privilegiera que tres peu la communication et survolera en général les paysages, les cultures, et le pays, sans vraiment s'en impregner et le comprendre, l'expatrié, au contraire, en se faisant des amis, en vivant le pays pendant plusieurs mois aura tout le loisir de s'y intégrer completement; au risque meme de ne plus etre du tout objectif quant a l'opinion sur ce pays. Le routard se situe un peu entre ces deux genres, facilitant la communication rapide, les amis de quelques temps, se laissant le temps de s'imprégner des lieux et des cultures, tout en restant relativement objectif, car tout juste intégré, il changera déja de place, vers un nouvel endroit. Ce qui rend d'ailleurs le voyage plus difficile a appréhender, car ce dernier sera fait de bouts de vie. Détachés de son pays d'origine (contrairement aux touristes) et pas encore bien attachés au pays parcouru (contrairement aux expatriés).
Quant a savoir ou se situent les limites...
Néanmoins pour revenir au taxi, les gens stressés ont souvent eu pour effet de me détendre. Aussi, je contemplais, heureux, ces paysages inhabités que nous traversions. L'allemande voulait a tout prix prendre le bateau pour naviguer au plus pres du glacier. Mais fin de saison oblige, le nombre minimum de personnes requis n'était pas atteint. Et alors qu'elle se démenait dans ces discussions pour savoir je-ne-sais-quoi, un des chiliens, Alvaro, qui n'en avait pas grand chose a faire de tout cet agitement pour une ballade couteuse en bateau, sortit pain, fromage et saucisson, et c'est ainsi que nous commencames un encas frugal, sur le toit du taxi, sur un parking ou la vue était assez médiocre. Notre chere allemande n'eut pas vraiment le choix et ne put finalement que se rallier a notre humeur foutiste du moment...
Oh, pas d'inquiétude, nous le vimes ce glacier. Le plus imposant qu'il m'a été donné de voir jusqu'ici, avec une facade de plus de 50 metres de hauteur, semblant flotté sur l'eau, a quelques dizaines de metres seulement de la péninsule ou nous étions perchés. Dégageant une force et une puissance encore plus grandes que celle du glacier Grey (vu il y a quelques jours), les craquements (coup de fusil, pétards chinois, ou effondrement d'un immeuble selon) lui donnaient la vie et les milliers d'immenses pics de glace qui le recouvrait semblaient nous prévenir de ne jamais s'aventurer sur cette surface imposante...
Aujourd'hui, me voila a El Chalten, les paysages semblent irréels. Les couleurs des arbres vont du vert au rouge, avec des centaines de nuances qu'un homme comme moi ne saurait nommer, si l'on excepte le jaune et le orange. On croirait que rocs, montagnes, vallées et végétation ont été retouchées informatiquement. Seuls les nuages ne sont pas parfaits, adoptent des formes et consistances étranges, et restent les seuls a m'assurer que ces paysages ne sont pas tirés de mon imagination. Je pourrais rester des heures, assis la, rien qu'a regarder une seule partie d'un bout des alentours... | En bonus, un fichier mp3: cliquez ici |
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